Est-il nécessaire de le rappeler, tous les cyclistes savent qu’ils pratiquent un sport où l’on perd plus souvent que l’on ne gagne.
Une évidence qui fait l’unanimité…sauf si l’on s’appelle Pogacar !
Quelle saison, en effet, que la sienne !
Fa-bu-leuse !
Son bilan nous ramène inévitablement à notre hypothèse du mois de juin :
« Le Slovène ne serait-il pas en train de devenir le plus grand champion de l’histoire du cyclisme ? »
Cette hypothèse n’était pas une boutade et les résultats obtenus depuis par le coureur nous invitent même à la transformer en thèse !
Vous devinez la suite de notre propos, que les réfractaires à cette théorie pourront éviter de lire ! Elle ne pourra en effet être autre chose qu’une défense et illustration de la thèse !
Pour le commun de ses adversaires, douze années de carrière ne suffiraient pas pour égaler un palmarès tel que le sien sur les huit mois de ce seul exercice 2024. Un palmarès qui évoque, pour les connaisseurs, celui des plus grandes années de Fausto Coppi (1949 par exemple) ou d’Eddy Merckx, disons 1969, une année qui avait vu le « Cannibale » remporter 43 courses sur un total de 129 disputées, soit une moyenne d’une sur trois ! Ou 33% malgré le complot du Giro et sa chute de Blois !
Certes les chiffres du Slovène sont plus modestes car les temps ont changé : les critériums ont disparu et il court beaucoup moins que ses aînés, mais statistiquement il gagne plus souvent qu’eux : 25 victoires pour 57 courses disputées (au 12 octobre) soit près de 50% !
Vérification faite, parmi les grands anciens, Coppi ou Bartali n’ont jamais dépassé 15 ou 16 victoires annuelles dans leurs meilleures saisons, tous leurs succès n’ayant pas l’équivalent du statut WorldTour par ailleurs !
Chronique :
Au moment où nous écrivions ces lignes (le 15 septembre 2024), Pogacar venait de remporter le Grand Prix de Montréal au prix d’un solo de 23 km, et déclarait viser le Championnat du Monde disputé à Zurich le 29 septembre avant de conclure par un quatrième Tour de Lombardie le 12 octobre !
Or ce Grand Prix de Montréal n’était que sa seconde course de reprise après la pause post-Tour de France et il faut n’avoir pas froid aux yeux pour annoncer de tels objectifs avec tant de confiance !
Ambition ou présomption ? La route nous le dirait.
…Et effectivement, ce 29 septembre, à Zurich, la route a parlé, et comment !
En estoquant ses rivaux à 100 km de l’arrivée, Tadej Pogacar vient d’enrichir son histoire sportive d’un exploit d’anthologie.
Sa déclaration n’était donc pas de la présomption, mais une « simple » conscience de sa propre valeur !
Il y a peu on aurait parlé d’un exploit : « à la Coppi », mais aujourd’hui on est tenté de dire : « à la Pogacar ! »
Nous sommes personnellement frappé par la coïncidence qui existe entre nos interrogations sur sa place dans la hiérarchie – ou dans l’histoire – du cyclisme et l’immédiateté de ses réponses pédales aux pieds ! Ce mondial de Zurich nous semble en effet faire écho à notre question du bulletin de juin dernier.
Le détail du peloton de ses adversaires est un argument complémentaire, car, à part l’infortuné Wout Van Aert, ils étaient tous présents à Zurich, la troisième place du tenant du titre, Mathieu Van der Poel, faisant référence.
Bref, pour nous la question est comme entendue : la réponse est affirmative, et nous attendons la suite avec impatience à titre de confirmation.
Car s’il y a déjà la qualité du palmarès que le Slovène est en train de se construire, il y a aussi la manière « Pogacar » !
Manifestement, il apparaît que s’il a un goût immodéré de la victoire, gagner ne lui suffit pas : il lui faut en plus sa signature de « la beauté du geste » !
Tadej n’est pas en effet un mauvais sprinter et il pourrait souvent se contenter de sa pointe de vitesse pour gagner « à l’économie ».
Or ce n’est jamais le cas et il préfère accompagner chacune de ses victoires d’un « coup d’éclat » avec, en plus, un geste personnel adressé à la foule en franchissant la ligne d’arrivée !
Cette année, tout avait commencé en Italie, sur les « Strade Bianche », avec ses 82 km d’une échappée téméraire qui l’avait vu terminer « à l’arrache ». Mais ses 100 km de Zurich, répondant plus à un coup de folie qu’à un coup de génie, résument désormais pour toujours son fonctionnement qu’on pourrait qualifier de romantique : c’est encore plus beau quand c’est inutile !
Ce qu’on appelle le panache.
D’une indispensable revue de presse au lendemain d’un tel exploit, nous retenons que la chronique semble découvrir la dimension du champion, posant la question qui nous habite depuis juin. Selon Merckx, en tout cas, il est plus fort que lui. Et Hinault confirme. Que dire de plus ?
On pourra parler du coup de Zurich comme d’un véritable coup de Jarnac. Il a fait de cette course un modèle du genre, un authentique chef d’œuvre.
Au départ, sa tête était mise à prix. 196 des 197 partants savaient en effet qu’ils n’avaient qu’une seule chose à faire pour être champion du monde : le devancer sur la ligne d’arrivée. Et ils avaient 274 km à leur disposition pour y parvenir !
A 196 contre un (nous simplifions), cela ne semblait pas impossible. Il suffisait de garder la bonne cartouche, c’est-à-dire la dernière, pour le bon moment.
Sauf qu’en l’occurrence, la bonne balle, celle qui fit mouche, fut la première ! Et que c’est le « mis à prix » lui-même qui la tira !
Un seul coup, un seul, lui aura suffi en effet pour réduire à quia la totalité du peloton. La chasse à courre allait durer 100 km, l’épuisement sembla un instant menacer l’audacieux, mais il n’y eut pas d’hallali : c’est la meute qui rendit l’âme !
Le fuyard, quant à lui, semblait voler, de sa pédalée fluide, gracile, effectuant une sorte de démonstration selon un plan dûment prémédité !
Mais en l’occurrence plan y eut-il ? Si oui, celui-ci aurait été suicidaire ! Mais il semble, selon Tadej lui-même, qu’il faille plutôt parler d’improvisation, laquelle, a priori tout aussi insensée, fut un peu chanceuse, avec le bienvenu concours du formidable rouleur slovène Jan Tratnik, parti « en éclaireur » (?), et qui, bien que salarié ordinaire de la Visma-lease-a-bike, se releva pour attendre Pogacar et l’aider à revenir sur les échappés.
Puis Tadej put obtenir le soutien, plus miraculeux, de Pavel Sivakov, son équipier chez U.A.E. le reste de l’année certes, mais théoriquement adversaire ce jour-là en tant que sélectionné de l’équipe de France pour ce Championnat !
Situation cornélienne pour Sivakov, aggravée par l’absence des oreillettes permettant ordinairement la communication du coureur avec le reste de l’équipe et même avec le directeur sportif. Que faire qui ne trahisse ni l’un, ni les autres ?
Mais un gentlemen agrement sembla rapidement trouvé entre les deux coureurs, Tadej ne tardant d’ailleurs pas à prendre l’affaire à son propre compte, bien qu’il lui restât plus de 50 km à couvrir en solitaire avec un avantage qui dépassa rarement la minute !
Bref, au soir de ce 29 septembre, il ne lui « manquait » que le prochain Tour de Lombardie pour lui permettre de conclure : « Saison accomplie » !
Rendez-vous au 12 octobre !
…
Mais c’était oublier qu’avant le 12 octobre, il y avait le 5 et le Tour d’Emilie, une occasion en or pour le nouveau champion du monde d’étrenner victorieusement son étincelant maillot arc-en-ciel.
Ce qu’il n’a pas manqué de faire avec 28 km d’échappée solitaire pour sa 24° victoire de l’année…et la 87° de sa carrière ! A 26 ans (depuis le 21 septembre !).
Et encore fallut-il que, le mardi 8 octobre, le ciel se fît apocalyptique pour que Les Trois Vallées Varésines soient interrompues avant que Tadej n’en augmentât sa moisson de l’année!
Le samedi 12 octobre était donc une nouvelle (et dernière) occasion pour Pogacar de conforter sa réputation d‘invincibilité et de talonner Fausto Coppi !
Question : Sera-t-il fidèle à ce rendez-vous qu’il a lui-même fixé avec l’Histoire?
Il écrivit sa réponse sous nos yeux : un constant contrôle de la course, une seule accélération comme à Zurich, 48 km d’échappée solitaire, 3’16’’ d’avance sur un valeureux Evenepoel à l’arrivée, un quatrième Tour de Lombardie consécutif (comme Coppi entre 1946 et 1949), sa 25° victoire de l’année (sur 57 disputées), la 88° de sa (toujours jeune) carrière, etc. Les chiffres démontrent imparablement ce que les mots n’osent pas déclarer : « Pogacar est bien en passe de devenir le plus grand champion cycliste de tous les temps ! ».
Et le lac de Côme a offert son site enchanteur pour que le champion en état de grâce donne à sa saison le point d’orgue, (nous allions écrire « ogre » !) qu’il souhaitait.
En voici deux échos extraits de la presse « spéciale » française :
Apparemment la comparaison avec Fausto Coppi n’est plus sacrilège, et ce n’est pas nous qui dirons le contraire !
Et puisqu’il vole de record en record, notons qu’au lendemain de ce Tour de Lombardie mémorable, il se trouve nanti de 11.655 pts au classement de l’U.C.I.,-- dont il est le leader depuis 4 ans --, soit près du double des 6.072,57 pts de son second, Remco Evenepoel, lequel est pourtant à la fois le récent double champion olympique de la course en ligne et du contre-la-montre et le champion du monde de cette dernière spécialité !
Après une saison aussi vertigineuse que peut-il bien nous réserver pour 2025 ? Milan-Sanremo ? Paris-Roubaix ? La Vuelta ?
Avec lui, désormais, rien ne semble impossible, tant il aborde tout comme s’il ne s’agissait que d’un simple jeu pour l’adolescent dont il a gardé le visage et la silhouette !
Mais nous nous doutons bien qu’entre l’admiration candide et la suspicion systématique il y a matière à débat, et nous lirons volontiers vos réflexions à ce sujet, vous promettant d’en nourrir notre prochain bulletin !
La parole est à vous…
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Gérard S. (La Vélocyclette
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Les 21 étapes du Tour de France 2025
1ère étape : Lille - Lille (samedi 5 juillet)
2e étape : Lauwin-Planque - Boulogne-sur-Mer (dimanche 6 juillet)
3e étape : Valenciennes - Dunkerque (lundi 7 juillet)
4e étape : Amiens - Rouen (mardi 8 juillet)
5e étape : Caen - Caen (contre-la-montre) (mercredi 9 juillet)
6e étape : Bayeux - Vire Normandie (jeudi 10 juillet)
7e étape : Saint-Malo - Mûr-de-Bretagne (vendredi 11 juillet)
8e étape : Saint-Méen-le-Grand - Laval (samedi 12 juillet)
9e étape : Chinon - Châteauroux (dimanche 13 juillet)
10e étape : Ennezat - Le Mont-Dore - Puy de Sancy (lundi 14 juillet)
Mardi 15 juillet : repos à Toulouse
11e étape : Toulouse - Toulouse (mercredi 16 juillet)
12e étape : Auch - Hautacam (jeudi 17 juillet)
13e étape : Loudenvielle - Peyragudes (vendredi 18 juillet)
14e étape : Pau - Luchon Superbagnères (samedi 19 juillet)
15e étape : Muret - Carcassonne (dimanche 20 juillet)
Lundi 21 juillet : repos à Montpellier
16e étape : Montpellier - Mont Ventoux (mardi 22 juillet)
17e étape : Bollène - Valence (mercredi 23 juillet)
18e étape : Vif - Courchevel - Col de la Loze (jeudi 24 juillet)
19e étape : Albertville - La Plagne (vendredi 25 juillet)
20e étape : Nantua - Pontarlier (samedi 26 juillet)
21e étape : Mantes-la-Ville - Paris (dimanche 27 juillet)
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